mardi 6 août 2013

Les Opposés : Des Correspondances invisibles...

Ecrivain français Charles Baudelaire professe que les opposés se correspondent, que le mal appelle le bien, que la chute appelle l'élévation. En réalité ce ne sont pas des oppositions, mais des correspondances. L'un n'existe pas sans l'autre, si l'un est créé, l'autre jaillit simultanément.
Mais, que se passe-t-il lorsque la chute devient précisément l'élévation, lorsque le mal et le bien se touchent presque et se métamorphosent en une même unité? Qu'arrivera à notre système de vie bâtit d'une manière si calculée et perfide si on s'amusait à bouleverser les valeurs, en les transgressant en les manipulant, en jonglant avec leurs intensités et leurs dimensions? Imaginons que, par exemple, on se décide un jour de juger identiquement un roi et un mendiant ; en égalisant ces deux extrêmes, on atterrit non pas entre les deux, mais au-delà des deux. 
Notre cher créateur de mode anglais, Alexander McQueen transparaît cette rare élévation, qui n'est qu'anéantissement de toute valeur, de toute vérité, derrière son architecture. Il met en scène l'allégorie parfaite de ce qui est apostillé comme beauté et légèreté absolue (poupée dans une boîte à musique) pour ensuite la pulvériser de son antagoniste le plus dissemblable : le symbole provocateur de l'infect et obscène vie de la basse classe sociale ( spray noir salit et vert acide).

collection été 2000

L'anglais exploite les tensions entre le grand art et l'art grossier ; les jugeant égaux, il remet en doute toutes les dimensions de la vie qui est la notre. On se retrouve ainsi égaré dans ce sorte de no man's land, ne sachant ce qui est bon ou mauvais, ce qui est blanc ou noir, car ces différences cessent précisément d'exister, comme si anéanties, elles deviennent invisibles à l'oeil de l'homme, sa perception de vie a été bouleversée. L'être est alors contraint de déceler son monde comme s'il ouvrait ses yeux pour la première fois : Un monde nouveau où tout est équilibré, où le haut et le bas, le beau et le laid n'existent pas ( ou pas encore, car il est dans sa nature même de ne pas être capable de vivre d'une manière objective, la subjectivité qui est synonyme de culture l'aveuglera toujours. Néanmoins, pour un bref instant, il vit dans l'objectivité absolue n'ayant pas encore accorder des valeurs à toute chose, ne connaissant même pas le mot "valeur" dans ce monde perçu pour la première fois).
Voici le résultat lorsque les deux pôles se touchent enfin, simultanément ils se volatilisent, car on se retrouve finalement au-dessus de l'épais brouillard dont on ignorait l'existence. Delà découle alors de simples corps errant dans une pure et fraîche légèreté encore jamais ressentit. 
C'est cela que crée McQueen, une créature nouvelle, elle est le non-art qu'il appelle art, elle est l'anti-héros à qui il lui impose le nom de héros. Agissant ainsi, il brise toutes les vérités les dénonçant comme illusion.
Dans cette lucidité nouvelle, tout ce qui se trouve autour de nous se transforme soudainement en une cour de récréation multicolore, tout est fascinant, tout est nouveau, on redevient enfant, car on vit dans une ignorance si puissante qu'elle est en réalité un précieux savoir clairvoyant qu'on nous vole lorsqu'on retombe sur terre où règne ce sournois brouillard. ( Peut être découle de là le surnom d' "enfant terrible" attribué à Alexander McQueen. Aurait-il réussit à échapper ce brouillard qui n'est en réalité que culture)...
lorsque l'art et le non-art ne forment plus qu'une unité : 
toute dimension disparaît.
Au delà du bien et du mal, jaillit le sur-homme nietzschéen.

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